Par Michel Garibal
L’arrivée à Versailles par le train est un grand sujet de curiosité pour les touristes qui viennent visiter le château de Versailles. Ils ont le sentiment de faire une incursion dans une région qui relève de la belle au bois dormant
Pour les travailleurs au quotidien qui empruntent la ligne L ou le RER C, c’est une véritable souffrance qui est endurée, avec des retards qui ont des répercussions sur le travail et même la famille avec les gardes d’enfants qui sont perturbées. Car ce qui faisait la bonne réputation des trains français a disparu : confort, ponctualité, sécurité sont aux abonnés absents. Ce ne sont aujourd’hui que wagons bruyants, brimbalants, dont on se demande s’ils pourront arriver à destination tant ils sont à bout de souffle. Des trains ultra sensibles- certains ont soixante ans d’âge-, prêts à la moindre panne, mais aussi dépendants des aléas climatiques, comme le verglas, les chutes des feuilles sur les voies à la veille de l’hiver, avec des portes qu’il faut parfois fermer à la main, car les systèmes automatiques fonctionnent mal, tandis que les infrastructures sont dans un état pitoyable sur certaines lignes avec des caténaires qui claquent ou des aiguillages qui cassent. Pour les personnes à mobilité réduite c’est souvent le calvaire : des quais qui ne sont pas à la bonne hauteur des convois, des escalators ou des ascenseurs qui sont fermés lorsqu’il n’y a pas un personnel de surveillance.
Tous ces maux qui n’ont cessé de s’aggraver ont fini par provoquer une mobilisation de certains usagers. Une association a vu le jour il y a trois ans sous le titre « plus de train », composée essentiellement de jeunes cadres travaillant dans la région et qui ont fait appel aux moyens modernes de pression internet et les réseaux sociaux entre autre. Parmi ses membres les plus actifs figurent plusieurs versaillais, dont Emmanuel Lion, qui aussi conseiller municipal de la ville et a obtenu un soutien vigoureux du Maire, François de Mazières. Ainsi est né un véritable comité de surveillance de la ligne L, avec des référents en différents points du parcours pour noter toutes les défaillances de fonctionnement. Avec rapports à la clé, mobilisation des élus, articles ou interviews dans la presse. Nul doute que cette action d’envergure suivie par des milliers d’usagers a contribué à faire sortir la SNCF de sa torpeur, en lui faisant comprendre qu’il fallait aussi s’intéresser aux humains transportés et pas seulement au matériel.
Un premier résultat a été obtenu à la fin de l’an dernier avec une refonte de l’organisation de la ligne L. Une meilleure régulation a permis de réduire les embouteillages aux heures de pointe, d’assurer une desserte de certaines stations, mais au détriment de la durée qui s’est allongée de six minutes sur la totalité du parcours entre Versailles Rive Droite et Saint-Lazare. Cela aurait permis de réduire de moitié le nombre des retards selon la SNCF.
« Cela reste néanmoins du domaine du pis aller. Il n’y aura pas de véritable amélioration tant qu’on n’aura pas renouvelé la totalité des rames » souligne Emmanuel Lion, « car pour l’instant, on se borne a gérer la vétusté ». Une décision a été prise : en principe 19 trains flambant neuf de la marque Bombardier, à un étage devraient équiper la fameuse ligne d’ici la fin de 2017. Cet engagement devrait être tenu, d’autant qu’il a le soutien de la nouvelle présidente de la région Ile de France, Valérie Pécresse, qui a promis de fournir le reste des rames neuves nécessaires à la mi-2018 pour le tronçon de Versailles. Si les usagers de la gare Rive Droite peuvent se réjouir d’envisager la fin de leur calvaire, il n’en va pas de même pour le RER C, qui dessert aussi le château. La situation de cette ligne est dramatique selon Emmanuel Lion. « D’autant qu’il n’y a pas d’association pour pousser à la roue sur cette ligne qui transporte 500 000 voyageurs par an et où 12% des trains connaissent des retards. Et l’on a assisté à cette situation unique de la fermeture de la gare Rive Gauche et de la halte de Porchefontaine pendant une semaine au moment des inondations du printemps dernier, alors que les employés de la SNCF poursuivaient une grève, uniquement préoccupés par leurs revendications catégorielles ». Et la SNCF, faute d’être harcelée par les citoyens, continue de prendre des décisions unilatérales, telle que l’allègement des dessertes pendant deux mois et demi : avec les travaux qui ont commencé en octobre, un train sur deux sera supprimé aux heures de pointe, sans qu’on se préoccupe du bien-être des voyageurs. Là aussi, Emmanuel Lion souhaite qu’une mobilisation se mette en place, car les résultats encore modestes obtenus avec la ligne L, montrent que c’est le seul moyen aujourd’hui d’obtenir un changement dans un pays gangrené par l’immobilisme.